A l'époque la glace a aussi un usage médical. Nogaret,
propriétaire de la glacière de Sainte-Marthe, raconte:
"Avant que l'usage de la glace fût introduit dans la Provence,
tous les étés, la ville de Marseille était sujette
à des maladies populaires et contagieuses à cause de l'intempérie
de son climat, mais d'abord qu'on eut commencé d'en user, qu'on
eut reconnu combien elle était salutaire, que les médecins
l'eurent ordonnée aux malades, l'expérience lui donna
un si grand crédit que chacun s'empressait d'en avoir, à
quel prix que ce soit..."
Les
Marseillais s'habituent très vite à ce luxe nouveau.
Ils disent notamment :
"La clientèle fortunée
en fait un usage plus raffiné. Il suffit de piler la glace avec
du sel pour obtenir un mélange réfrigérant qui
permet de frapper verres et carafes. En y plongeant un pot d'étain
contenant lait, crème et sucre et en tournant très lentement
ce mélange, on fabrique de véritables" glaces".
On prépare aussi des sorbets à base de jus de fruits,
notamment à bord des galères dont les officiers constituent
le gros de la clientèle".
En
1648, Madame de VENEL obtient du Roy de France, le privilège
de construire, à elle seule, des glacières en
Provence, et de faire vendre et débiter toute la glace
qui en sortira.
Le 20 décembre 1650, c'est Antoine de VALBELLE qui obtient également
du Roy, le pouvoir de faire construire des glacières dans
la ville de Marseille et son terroir.
Le 3 aôut 1653, Madame de VENEL obtient
le maintien de ses privilèges au détriment d'Antoine de
VALBELLE, qui meurt peu après.
Le
29 décembre 1656, c'est Antoine GINOUVES
qui à son tour obtient des consults, ce même privilège.
Dès 1657, le propriétaire de
la glacière de Sainte-Marthe s'associe à un aubergiste,
Anthoine ARQUIÉ. Ils profitent de la carence des priviligiés
pour construire des glacières et pour vendre la glace sans leur
permission.
La plus grande consommation de glace se fait alors par les hostes, aubergistes,
cabaretiers, vendeurs de limonade et autres liqueurs....
|
-
Création de la ferme de la glace à Toulon
--
Vers 1718, le sieur HERMITTE passe
un contrat avec la Communauté de Toulon pour la fourniture de
glace dans cette ville. Ce contrat est ensuite renouvelé en 1722.
Celui-ci s'approvisionne directement aux glacières de la Sainte
Baume.
-- Vers 1759, Toulon consomme
1000 quintaux par mois (consommation annuelle de Marseille à
la même date).
La famille GUERIN est fermière de la glace de la Ville de Toulon
depuis 1760.
-
Création de la ferme de la glace à Hyères
Lors de la séance du conseil
municipal du 23 mars 1739 (réf.
BB3 p.115) :
"L'an 1739 et le 23ème
jour du mois de mars avant midi, par devant le notaire royal et greffier
de la Communauté de cette ville d'Hyères en présence
des témoins soussignés, furent présents monsieur
Joseph BATAILLE, avocat en la cour, sieurs JOURRE, RAYNAUD, De Hiacinte,
ROUX maire et consuls de la communauté d'une part et le sieur
Pierre LHERMITE de la ville de Toulon et d'autre. De leur gré
ont convenu et accordé que le dit Sieur LHERMITE fournira au
public du dit Hyères pendant le temps et terme de six années
consécutives, la courante comprise, toute la glace qui lui sera
nécessaire à raison de 8 deniers la livre, dont la débite
en sera faite en cette ville au frais et dépends du sieur LHERMITE,
depuis le 1er mai jusqu'au 15 du mois d'octobre de chaque année
; à peine de tous dépends, dommages intérêts
pendant lequel temps le dit sieur LHERMITE promet et s'oblige qu'il
ne manquera point de glace et qu'elle sera débitée et
délivrée journellement à tous ceux qui se présenteront
pour en avoir, avec cette condition expresse qu'au cacs qu'il arrivât
qu'il manquât de la glace durant un jour entier tant seulement
et que ce défaut procédât de la part du dit sieur
LHERMITE ou de son débitant, en ce cas il sera permis aux dits
sieurs Maire Consuls d'en envoyer chercher à frais et à
dépends et le dit sieur LHERMITE condamné à une
amende de trois livres pour chaque contravention, à quoi il s'est
volontairement soumis et obligé ; et les dits sieurs Maire Consuls
de leur part, ensuite de leur pouvoir de délibération
du conseil général du 15 du mois de février dernier,
promettent et s'obligent en faveur du dit sieur LHERMITE qu'il ne sera
débité dans cette ville et son terroir autre glace que
celle qui sera par lui fournie à peine de dommage et intérêts
et de confiscation et pour l'observation du présent, les dits
sieurs Maire Consults, obligent les biens et revenus de la dite communauté
et le sieur LHERMITE les siens et sa personne à toute cours de
soumission..
Concédé acte, fait en public au dit Hyères dans
l'hotel de ville, présents Joseph BAUSSAN, practicien et Jacques
REYNAUD, perruquier de la même ville, témoins requis...." |
Glacière au pied des remparts
nord du château d'Entrecasteau - (zoom)
Glacière de Cotignac à
proximité de la source Saint Martin - (zoom)
|
En
1685,
le physicien français Philippe de la Hire fut le premier à
produire artificiellement de la glace en enveloppant une toile pleine
d'eau fraiche avec du sel d'ammoniac humide.
En 1851, l'américain
John Gorrie mit au point la première machine à fabriquer
de la glace.
En 1860, Ferdinand Carré,
ingénieur, construisit le premier appareil réfrigérant
par vaporisation d'ammoniaque, suite aux découvertes des physiciens
anglais Leslie en 1811 et Faraday en 1823, relative à la liquéfaction
des gaz.
Avec la découverte de la machine à fabriquer de la glace,
on va arrêter progressivement la récolte de glace que l'on
faisait sur les nombreux sites de production.
On doit aussi à Monsieur Carré, le compartiment frigorifique
du "Paraguay", grâce auquel on fit le premier transport
de viande congelée entre l'Europe et l'Amérique.
En 1876, l'ingénieur
Charles Tellier équipa un bateau avec des cales réfrigérées.
Ce bateau était spécialisé dans le transport de
viande de boeuf sud américaine.
Les premières fabriques
de glace industrielle sont opérationnelles à partir de
1890.
FABRIQUE
DE GLACE A HYERES
Ci-après un extrait du journal
"Le Provençal" du 19 décembre 1955 qui nous
détaille la conception et le fonctionnement d'une fabrique de
glace installée à Hyères par la famille MARTELLI
à partir de 1897. La première de la région.
"Le matériel comprend (en 1955) : six compresseurs développant
au total une puissance de 200 cv pouvant produire deux cent trente mille
frigories/heure. Trois bacs à congélation de quatre, sept
et quinze tonnes, dans lesquels sont placés les mouleaux (récipiants
métalliques), dans lesquels l'eau pure se transforme en pain
de glace.
Sur la toiture, une station de refroidissement servant à liquéfier
les gaz ayant servi dans les compresseurs et qui se sont chauffés,
comprenant quatre pompes centrifuges 60 mètres cubes à
l'heure.
Les mouleaux sont placés dans le bac par rangées de douze
; sont remplis d'eau de la ville qui est reconnue biologiquement pure.
Le bac contient lui même une eau saumâtre, additionnée
de chlorure de calcium, qui empêche sa propre congélation
aux températures en dessous de zéro.
Cette eau est refroidie par un mélange gazeux réfrigérant
qui circule à l'intérieur d'un serpentin sous l'impulsion
des compresseurs. Le froid est produit par la détente directe
du gaz d'ammoniac qui dégage un grand nombre de frigories.
Ces frigories sont communiquées au bain qui circule entre les
mouleaux contenant l'eau pure dont la température décroît
petit à petit. Au bout de dix-huit heures la glace s'est formée.
Les mouleaux sont alors sortis du bain à l'aide d'un élévateur
et trempés dans un bain tiède qui décolle les pains
de glace des parois intérieures du récipient.
Il n'y a plus qu'à les incliner pour voir sortir les longs "bâtons"
que tout lemonde connaît bien.
Les gaz qui ont servi à produire le froid se sont réchauffés.
Ils sont amenés dans des tuyaux jusqu'à la station de
refroidissement qui se trouve sur la toiture où se liquéfient
à nouveau et retournent dans les compresseurs où ils sont
prêts à effectuer un autre cycle."
La fabrication
industrielle des réfrigérateurs électriques à
usage domestique va apparaître aux USA dans les années
1920, et en Europe à partir de 1935 . Cela va entrainer le déclin
progressif des fabriques de glace industrielle à partir de 1960.
Celle d'Hyères arrêtera définitivement son activité
en 1967.
Le réfrigérateur
.... et le congélateur sont aujourd'hui les appareils indispensables
dans toutes nos cuisines.
Pourtant,
comment s'organisaient nos parents et grands parents jusque vers les
années 1950 sans réfrigérateur ?
D'une façon schématique :
--- pour les produits qui s'altéraient rapidement : ils achetaient,
ils cuisinaient et ils consommaient (viandes diverses, animaux de la
basse-cour, poissons, lait ... avec lequel ils faisaient le yaourt),
--- ils mangeaient beaucoup plus de légumineuses qu'aujourd'hui,
comme les haricots secs, lentilles, pois chiches etc... qui apportaient
les protéines nécessaires ainsi que les céréales.
--- dans le lieu le plus frais de la maison il y avait le "garde
à manger " équipé de sa moustiquière
qui permettait de conserver : les oeufs, le fromage, les charcuteries
sèches ; saucisson, jambon cru etc ...)
--- les légumes et les fruits achetés au coup par coup
ne posaient pas de soucis,
--- le pain qui avait une part importante dans l'alimentation se conservait
plusieurs jours car il était fabriqué avec de la farine
complète et du levain naturel,
--- en été, le beurre était descendu dans le puits
de la maison à l'intérieur d'un panier et il était
suspendu au ras de l'eau.
Aujourd'hui, notre
mode de vie et nos habitudes ont bien changé !
|
Publicité pour appareil
à produire de la glace - (zoom)
(site original - http://urzhiata.emoc.org)
FABRIQUE DE GLACE A HYERES
ETABLISSEMENTS MARTELLI
Vue intérieure de l'usine
- (zoom)
Personnel en activité
dans l'usine - (zoom)
Sortie des mouleaux à l'aide
d'un élévateur - (zoom)
Les" pains sortis" du
moule sont disposés sur
une planche par avant d'être emportés - (zoom)
|
Localisation
- Le Var
Durant un peu plus de deux siècles, environ
une quarantaine de glacières et puits à glace ont été
aménagées sur différentes
communes du Var. Celles qui ont été répertoriées
sont notamment situées à Aiguines, Ampus, Brovès,
Brue-Auriac, Barjols, Cabasse, Callian, Carnoules, Claviers, Comps-sur-Artuby,
Correns, Cotignac, Draguignan, Entrecasteaux, Evenos, Fréjus,
La Cadière, La Garde-Freinet, La Roquebrune, Le Castellet, Cuers,
Le Beausset, Le Luc, Le Val, Lorgues, Montauroux, Montfort, Pignans,
Rians, St-Maximin, Trans.
Dans le massif de la Sainte-Baume, le site de Font Frège (signifiant
en provençal "source froide") est situé dans
l'ubac du Mourré d'Agnis à environ 800 mètres d'altitude
sur la commune de Mazaugues. Il possède la plus ancienne glacière
qui date de 1640. A ce jour, les vestiges de 18 (sur 21) d'entre elles,
restent encore visibles dans ce seul secteur à l'abri du soleil
et du vent.
-
Les Bouches du Rhône
Dans la ville et autour de Marseille, il y en avait au moins une trentaine
qui se situaient sur différents sites :
-- L'hubac de la Chaîne de l'Etoile
: Mimet (1686), Château de Mimet (1670), Fabrégoule (1668),
Simiane Collongue (1700), Le Pin (1686).
-- L'Est de l'étang de Berre : Vitrolles
(1663), Le Griffon (1680), Le Logis du Repos (1680), Marignane
(1673), Saint Victoret, Lançon.
-- Le ruisseau des Aygalades, le Cavavelle
: La Bédoule (1671), Sainte Marthe (1656), Les
Baumes de Saint Antoine (1665), Les Gallades-Frême Morte (1665),
Saint Joseph (1670), Servière (1670), Saint Jérôme
1 (1659), Saint Jérôme 2 (1661).
-- Le ruisseau de l'Evêque : Saint
Lazare-Camp de l'Evêque (1665), Le Gros Horloge (1665), Rue des
Isnard (1665).
-- Les bords du Jarret et vallon de l'Huveaune
: Plaine Saint Michel (1660), Chemin de la Magdeleine
(1680), Notre-Dame du mont (1686), Quartier de la Loube (1690), Saint
Loup (1689), Pont de Joux-Auriol (1700), Les Encaneaux-Auriol (1698),
Auriol Village (1702).
Les plus importantes étaient destinées à alimenter
en glace les zones urbaines de Marseille et également Toulon.
Alimentation en eau
Le massif calcaire de la Sainte Baume permet de
stocker une importante quantité d'eau lors des périodes
pluvieuses. Cela donne ensuite naissance
à de nombreuses sources. Les eaux de celles-ci
sont alors canalisées vers les bassins de congélation
pour les plus importantes. Pour les autres, la glace est récupérée
sur tous les plans d'eau disponibles qui ont gelés (ruisseaux,
cours d'eau, champs inondés, bassins etc...)
Bassins
de congélation
Ceux
de la glacière de Pivaut s'étendent
juste à côté et au dessus de celle-ci.
L'aire de congélation est d'environ 5000m2.
Elle est composée de trois bassins dont le fond est imperméabilisé
par la présence d'argile et qui sont séparés par
des butées de terre et de murettes. Celles-ci permettent la circulation
du personnel qui transporte la glace extraite et offre
la possibilité de remplir les bassins individuellement.
Différentes
types de glacières
- Glacières occasionnelles
Certains écrits témoignent de stockage de glace sous des
édifices, dans des souterrains très frais, mais de taille
modeste. C'est en principe
pour de la consommation familiale.
- Glacières de stockage
Elles sont généralement de taille relativement
modeste (de 50 à 150 m3 pour 8 m maxi. en profondeur)
et se situent à proximité des lieux de consommation. .
-
Glacières de production
Elles sont le plus souvent de grandes tailles et se situent à
proximité immédiate des lieux d'extraction de la glace
(et des chutes de neige qui font un apport complémentaire), mais
loin des lieux de consommation.
Construction
des glacières
- Mode d'emploi
Un texte découvert dans les archives paroissiales de Sainte-Marthe
par Gilles Milhière donne la synthèse des éléments
indispensables à sa réalisation. Ci-après la reproduction
littérale :
"Mémoire pour faire
une glacière :
-- Premièrement faut avoir un lieu pour faire la glacière
propre c'est à dire quy soit à un endoit que ne soit point
dominé à cause que les eaux pluviales ne lui puissent
pas entrer dedans car si cela arrice la glacière ne vaudra rien.
-- Pour une glacière de 2000 quintals (1) faut la faire de vingt
sept à vingt huit pans (2) profondeur. Faut quelle aye en haut
au plan de la porte vingt trois pans large franc d'oeuvre.
-- Au fond de la glacière faut qu'elle aye aussy quatorze ou
quinze pans largeur aussy franc d'oeuvre.
-- Faire la porte ou du côté mistral ou de la montagnière
à cause que se sont les deux vents les plus frais.
-- Par ainsi l'ouvrier qui la fera prendra ses mesures de la restraindre
de quatre pans par chaque canne (3) en ôtant la terre ou en fesant
la massonerie.
-- Si la faire à cape de four (4) faut que l'ouvrier fasse les
batayos (5) plus épaisses que sy la faites faire avec des saumies
(6) c'est la connaissance de l'ouvrier.
-- Pour le couvert sy lon met des tuilles faudrait luy mettre des tuilles
nié (7) à cause que le gel et le degel les brisent tous
est estant come je dis nié avec du mortie mêlé avec
du platre que les tuilles ne soit point en dure beaucoup davantage.
(1) quintal = env. 40 kilos --> 2000 quintals = 80000 kg = 80 tonnes
(2) pan = 25 cm --> 28 pans = 7 mètres
(3) canne = 2 mètres
(4) cape de four = voûte
(5) butayos = contrefort, butée
(6) saumies = poutres
(7) nié = rayé
-
Creusement du puits
- Il faut essayer de trouver un terrain tendre pour creuser le puits.
Il faut cependant qu'il ait une tenue suffisante afin de prévenir
les éboulements qui nécessiteraient alors la mise en place
d'étaiements.
-
Les murailles
Elles
sont construites
en blocs extraits dans l'environnement du site. Ceux-ci sont grossièrement
équarris mais ajustés à la perfection. Ils sont
liés au mortier de chaux ce qui permet de rendre la paroi étanche.
Leur
épaisseur
constitue l'isolant principal pour la conservation de la glace. A la
glaciaire de Pivaut cette épaisseur atteint de 2,50 mètres
à la base.
Comme expliqué dans le mémoire ci-dessus la partie basse
des parois est évasée vers l'intérieur.
Pour
assurer une bonne isolation thermique du bâtiment la partie centrale
du mur est rempli de terre argileuse
dans la partie hors-sol.
-
La couverture en tuiles
-- Sur voute
Le plus souvent les glacières ont une couverture en voûte
de pierres dite en "cape de four" et peuvent également
être réalisées en pierres sèches. Une couche
de sable provenant des déblais renforce l'isolation de la voûte
et sert d'assise pour la pose de la couverture en tuiles.
-- Sur charpente
bois
La glacière du Pin près
de Septèmes a sa couverture de tuiles supportée par une
charpente en bois, comme pour un entrepôt mais avec une isolation
complémentaire qui peut être réalisée avec
de la paille.
-
Le fond de la glacière
et sa vidange
Le
sol est de forme concave afin de concentrer les eaux de fusion de la
glace en un point particulier. Il est
réalisé en dalles disjointes qui dirigent ces eaux
vers un canal d'évacuation. Celui-ci
part du fond de la glacière et sort à l'air libre au bas
de la pente où celle-ci a été construite. Les caractéristiques
de ce canal sont très variables selon les sites. Il est
indispensable d'évacuer ces eaux car
sinon cela accélèrerait la fusion de la glace.
La quantité
d'eau fondue représente environ 10% du volume stocké dans
la glaciaire pour une saison. Ce
canal permet également d'évacuer les eaux qui servent
à nettoyer le réservoir avant son remplissage.
Dans le cas de la glacière
du Pin, il a été impossible de réaliser cette évacuation
des eaux en gravitaire car la roche et très dure. Il a fallu
creuser un puits de 1,40m de diamètre et de 12m de profondeur
juste à côté de la glacière et les relier
entre eux à la base par un petit boyau. Un homme était
payé tout au long de l'année pour vider les eaux de fusion
de la glace de ce puits.
-
La glacière GAUDIN (dit de Pivaut)
-
Elle a une
hauteur totale de 23 mètres et un diamètre extérieur
de 19,80 mètres. Cela a représenté environ 4500
m3 de déblais à extraire. Commencé en 1875, il
faudra une dizaine d'années avant qu'elle ne soit mise en service.
- La glacière,
qui est sur un terrain pentu, est enterrée environ au 2/3.
- Les ouvertures sont initialement au nombre de cinq. Elles définissent
alors deux niveaux de remplissage et sont équipées de
triple portes entre lesquelles est mis en place de la paille afin d'accroître
l'isolation.
Le
personnel qui travaille aux glacières
Les paysans situés à proximité des glacières
constituent la main d'oeuvre occasionnelle essentielle pour l'exploitation
de celles-ci en hiver comme en été.
Production
de la glace sur place
A
la glacière de Pivaut, la hauteur d'eau dans les bassins qui
est d'environ 15cm à 20 cm, permet de produire 750 m3 lorsque
la glace a entièrement prise. Dans la pratique, sauf par très
grand froid, la glace est récupérée dés
qu'elle atteint 3 à 5cm d'épaisseur. La scie permet de
découper les blocs de glace au gabarit souhaité afin de
les transporter jusqu'à la glacière à dos d'homme,
avec des bêtes ou des wagonnets. Ce travail se fait essentiellement
au petit matin lorsque la température est encore basse.
Dans certaines régions qui ne peuvent pas aménager de
bassins de congélation, c'est la neige qui va être récupérée
et stockée. Il y aura alors un travail de compactage plus important
à réaliser.
Récupération
de glace extérieure
Dés
l'ouverture de la glacière, en complément au bassins de
congélation, les habitants des environs se mobilisent afin de
récupérer de la glace sur tous les plans d'eau disponibles.
En 1729, la charge de mulet (140 kg environ) se négocie à
3 sols. Les archives nous indiquent qu'en 1729, 150 personnes différentes
apportent de la glace pendant 23 jours représentant 8700 charges
de mulet, 5500 charges de bourrique (soit environ 2000 tonnes).
Stockage
de la glace
-
Nettoyage du fond de la glacière
Afin
d'avoir une bonne qualité de glace, il faut que la glacière
soit dans un état parfait de propreté. Tous les dépôts
accumulés sont enlevés et l'ensemble est rincé
à grande eau.
- Préparation du fond de la glacière
Afin d'éviter que la glace ne soit au contact de l'eau de fonte,
il est indispensable d'isoler la masse de glace du fond de la glacière.
Pour cela plusieurs techniques vont être utilisées :
-- La plus courante consiste à entreposer des sarments de saule
constitués de branches droites entrelacées (1000
sarments pour une glacière
de 700 m3).
-- Une autre consiste à
poser des troncs d'ifs les uns contre les autres .
-- A Arles, il y a neuf piliers de pierre de taille qui supportent des
madriers en bois de chêne sur lesquels sont clouées des
pareplanches de 4 pouces d'épaisseur, espacées de 1 pouce
pour l'écoulement de l'eau.
Sur chacune des ces trois préparations sont rajoutés des
fagots de branchage (tamaris ou autre) sur lesquels il va être
mis en place une épaisseur de paille qui complète
l'isolation du fond du stockage.
Pour une glacière de 700m3, cela nécessite le travail
de 5 à 6 paysans durant une semaine environ.
- Remplissage de la glacière
La
glace est ensuite descendue dans la glacière de différentes
manières suivant la consistance de la glace (basculement direct,
au moyen de cordes et poulies dans des récipiants
ou sur des plans inclinés).
Les ouvriers accèdent au fond de la glacière
à l'aide de grandes échelles. Là, c'est dans la
pénombre froide et humide, juste éclairés par des
lampes à huile, qu'ils vont réaliser ce travail pénible
de "cavage" (compactage de la glace ou de la
neige) par couche de 20 à 40 cm à l'aide de dames
de bois. Chaque épaisseur est séparée par de la
paille. Au fur et à mesure, un isolant constitué généralement
de paille est placé verticalement entre les parois de la glacière
et la glace.
Lorsque le
remplissage est terminé il faut
alors réaliser la confection du "chapeau". Pour recouvrir
l'ensemble, il faut une glace d'une qualité particulière
qui doit être parfaitement lissée. Avant de fermer la glacière,
l'espace compris entre le chapeau et la
voûte doit être rempli de paille .
Toutes les ouvertures sont alors
condamnées au moyen de triple portes afin d'assurer une bonne
isolation thermique. Pour augmenter
celle-ci, l'espace ainsi laissé est également bourré
de paille. Dans certaines glacières la porte principale ne s'ouvre
pas directement sur l'extérieur mais dans un sas semi-tempéré
qui peut servir d'atelier ou de logement.
Pour une glacière de 700 m3 cela représente
environ 600 journées de travail sur une période de 3 semaines
environ.
Commercialisation
de la glace
-
Période
Dans les archives de la ville d'Hyères nous retrouvons trace
d'un
contrat passé en 1739 entre la communauté et sieur
Lhermitte relatif à livraison de glace entre le 1er mai et le
15 octobre. Cela nous prouve que l'extraction et les livraisons de glace
se faisaient pratiquement durant la moitié de l'année.
-
Extraction
Les
portes, calfeutrées en général vers février,
sont ouvertes au début mai. La paille qui protège "le
chapeau" a pourri sous l'effet de la glace qui a fondue. Il faut
donc faire un bon nettoyage de celle-ci avant de commencer l'extraction.
La glace est alors découpée en blocs et comprimé
dans deux types de cornues :
-- La première technique semble
avoir été le remplissage de cornues en bois
équipées de deux poignées en bois afin de pouvoir
les soulever avec un palan, les manipuler à la main et les attacher
sur le dos des mulets. Ce moyen de transport est essentiellement employé
jusque vers 1790.
-- La deuxième technique consiste
à comprimer la glace dans des moules métalliques cylindriques
sans fond qui s'ouvrent verticalement avec des charnières. Ils
sont hissés
au moyen de poulies jusqu'à la porte de la glacière. Les
pains de glace, qui pèsent 300 kg, sont alors démoulés
et chargés sur des charrettes.
L'isolation thermique est constituées de sacs de jutes, de paille
et de végétaux divers afin de limiter la fonte de la glace.
Il est estimé que dans le massif de la Sainte Baume il était
produit en moyenne de 1000 à 3000 m3 de glace par année
avec environ une soixantaine d'ouvriers.
- Transport
-- Avec les animaux
Le transport est assuré de nuit par des cortèges de mulets
et de bourriques (ânes) afin de livrer la
glace juste à l'aube, principalement dans les villes
de Marseille et de Toulon. Afin de gagner du temps des raccourcis sont
quelquefois empruntés et les accidents ne sont pas rares. Les
premiers arrivés sont sûr de vendre leur glace. Durant
le parcours il y a une perte de 20 à 30% du volume.
Il est à préciser que la glace était pesée
à la sortie du puits.
--
Par bâteaux
Quand la glace manque pour des raisons climatiques, le fermier va quelquefois
en chercher jusqu'à Grenoble, par bateaux, car tous les jours
ou la glace manque, c'est une amande à payer !
Il faut alors descendre l'Isère et le Rhône avec des bâteaux
spécifiques pour ce genre de transport, puis ralier Marseille
par la mer.
Avec tous les aléas de transport et les conditions climatiques,
la glace s'accomode mal d'un si long parcours. Les quantités
débarquées sont bien souvent minime par rapport au volume
chargé.
- Distribution
A
Marseille, de 1642 à 1660, la glace est vendue directement essentiellment
dans les auberges.
Ensuite, au temps de la ferme, la vente se fait directement dans des
"bureaux" dont l'emplacement est fixé par les échevins.
Le
fermier de la ville de Toulon, signe des
contrats de ferme également avec d'autres commnunes comme
nous l'avons vu pour la ville d'Hyères.
Au fur et à mesure que la temps passe .... la glace fond .....
et prix augmente !
Différentes
utilisations de la glace
- Les pains de glace à placer dans des
armoires fermées herméthiquement afin de rafraichir les
denrées alimentaires et les boissons (ancêtre du réfrigérateur),
- La glace concassée permet de rafraichir directement les étalages
des poissonneries et autres,
- La glace pour rafraichir les couverts et verres avant un repas,
- La glace à immerger dans les boissons (glaçons),
- La glace pour réaliser des sorbets et glace (à l'ancienne),
- La glace à immerger dans des bacs d'eau pour refroidir les
bouteilles et autres boissons,
- La glace pour des applications médicales (boissons fraiches
ou applications locales sur les maux à soigner).
La glace naturelle
fabriquée à la Sainte-Baume a toujours été
un produit de luxe relatif. Jusqu'au début du XXe siècle,
le kilo de glace se vendait au prix du blé !
|
Schéma de fonctionnement
de la glacière de Pivaut
avec ses bassins de congélation situés juste
au dessus de l'ouvrage - (zoom)
Illustration de sciage de la glace
- (zoom)
(site original : http://www.stpierreetmiquelon.com)
Illustration du transport de la
glace vers les glacières
(zoom) - (site original)
Extrémité de la
galerie d'évacuation des eaux de fonte de la glace qui sert
également de galerie d'accés pour l'entretien de la
glacière lorsque celle-ci est vide - (zoom pour voir l'intérieur)
Porte principale de la glacière
pour l'extraction de la glace - (zoom)
Porte inférieure pour la
sortie de la glace avec son mur de 2,50 mètres d'épaisseur
- (zoom)
Intérieur de la glacière
de Pivaut et ses accés - (zoom)
Intérieur de la glacière
et sa voute en coupole - (zoom)
Façade sud de la glacière
de Pivaut - (zoom)
Bassins de congélation
à la glacière de Pivaut. A gauche, un des murs de séparation
des bassins - (zoom)
Façade ouest avec à
droite son plan d'accés de chargement - (zoom)
Plan d'accés pour chargement
de la glacière de Pivaut
à proximité des bassins de congélation - (zoom)
Fond de la glacière. On
peut voir le départ de la galerie d'évacuation des eaux
de fonte de la glace- (zoom)
Transport de neige ou de glace
à dos d'homme
(zoom) - (site original)
Cornue en bois de 40cm de diamètre
et 55cm de hauteur (70 litres) avec poignées taillées
dans bois massif - (zoom)
Cette cornue qui servait à faire les vendanges à Hyères
ressemble peut-être à celles utilisées pour le
transport de la glace
Illustration de transport avec
mulet qui portait ainsi deux cornues de 70 kg - (zoom) - (site
original)
Avec l'amélioration du réseau routier le transport de
la glace vers les sites de livraison peut se faire avec les charrettes
- (zoom) - (site original)
Armoire glacière pour le stockage de la glace et des aliments
- (zoom) - (site original)
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