La glace a t'elle eu son âge d'or ....blanc ???


La réponse est ... OUI !
Nous allons retracer dans quel contexte la glace naturelle a eu son "AGE D'OR", et ses années difficiles avant que le progrès ne vulgarise sa fabrication de façon industrielle et ensuite que les réfrigérateurs individuels ne déciment ces fabriques et toute une corporation de travailleurs.

Une nouvelle fois, nous allons remonter dans le temps.

SON HISTOIRE
La glace de la nature

Les temps anciens
La préhistoire
Afin d'illustrer cette première partie, pour laquelle nous n'avons aucun témoignage, je vais m'amuser à la rédiger sous forme d'une petite histoire romancée.
"Après un hiver bien rigoureux, les beaux jours arrivaient enfin et la neige commencait à fondre. l'homme et sa compagne avaient quitté leur caverne pour aller à la chasse. Après une demi-heure de marche, ils virent les pattes arrières d'une biche qui dépassait d'un tas de neige. Ils furent surpris de constater que la viande était bien conservée. Ils amputèrent l'animal d'une patte. Puis avant de repartir, ils allèrent chercher quelques bonnes brassées de neige pour recouvrir la partie visible de l'animal afin de bien la camouffler des rodeurs et des prédateurs.

Ils renouvelèrent l'expérience à plusieurs reprises et constatèrent que la viande de l'animal ne se détériorait pas.
Quelques semaines plus tard, la chasse en famille fût très fructueuse. Ils eurent alors l'idée d'ensevelir le surplus de leur chasse là ou la neige restait bien ferme et ne fondait pas. Ils se dirent qu'ils pourraient venir en prélever de temps en temps lorsque le gibier se ferait plus rare."

En 1997, la découverte du mammouth "Jarkov" dans l'extrême nord de la Sibérie nous a montré les capacités de concervation de la glace après plus de 20 000 ans.



Le mammouth Jarkov dans son sarcophage de glace
après 20000 ans - (zoom)
(site original - http://www.transpolair.com)

Vers 2000 ans avant J.C.
En Mésopotamie (aujourd'hui l'Irak), ainsi que sur divers sites de la méditérranée orientale, vers 2 000 av. J.-C., il a été retrouvé de nombreux vestiges relatifs à l'usage et au commerce de la glace.

Vers 50 ans après J.C.
Dans la Rome Antique, Néron avait imaginé de faire bouillir l'eau afin de la rendre plus pure et plus digeste. Il la réfrigérait ensuite dans un bain de neige. Cela donnait naissance à un nouveau type de breuvage, "la decocta". L'astuce de Néron était d'éviter la consommation directe de neige qui s'était salie dans les souterrains et fosses où elle était conservée, mais d'en utiliser tout le pouvoir réfrigérant.

Au moyen âge
Les recettes pour la réalisation des glaces et des sorbets semblent être successivement passées des Chinois, aux Persans, aux Arabes qui eux-mêmes l'ont fait connaître aux Italiens. Ces préparations devinrent populaires à Venise à l'époque de Marco Polo.
La technique consistait notamment à faire couler sur les parois extérieures des récipients emplis de sirop un mélange de neige et de salpêtre.

La Renaissance
Ces préparations gagnèrent toute l'Italie et c'est Catherine de Médicis, devenant reine de France par son mariage avec Henri II, qui nous les apporta en 1553. Grace à leur commerce les marins marseillais n'ont certainement pas attendu Catherine de Médicis pour déguster ces gourmandises.


Le Petit Âge Glaciaire
** Le Petit Âge Glaciaire a eu ses périodes les plus froides entre 1350 et 1850 avec deux remontées de température vers 1450 et 1700.
Plusieurs indices le soulignent, cette période froide aurait été provoquée par une éruption volcanique. Le volcan en cause vient d’être identifié en Indonésie, sur l’île de Lombok. Il s’agit du Samalas, dont l’explosion qualifiée de mégacolossale serait survenue entre mai et octobre de l’année 1257. Cette gigantesque quantité de particules et de gaz projetées dans l'atmosphère serait à l'origine de ce changement climatique sur plusieurs centaines d'années.
** Cette période de climat très froid, va favoriser l'essor du développement de l'activité relative au commerce de la glace naturelle en Provence.
La glace naturelle en Provence

De 1600 à 1789
A cette époque, cela pose bien des problèmes pour se procurer de la glace au coeur de l'été, période durant laquelle elle est vendue fort cher. Le ramassage, la conservation, le transport et la vente nécessitent des techniques adaptées à son caractère essentiellement périssable.
Dans la ville de Marseille, l’été de 1642 est considéré comme l'un des plus chauds du siècle. L'hygiène dans les rues étant déplorable, la vie y est bien difficile. C'est ce qui a encourage deux marchands, Pierre Roman et Louis Roubaud, à envisager d'investir dans la construction de glacières.
- Privilèges de la glace à Marseille
C'est le 31 décembre 1642 que les deux marchands
obtiennent les lettres patentes de Louis XIII qui leurs donnent le privilège de construire des glacières pour la conservation de la neige et de la glace. Cette concession est valable pour une période de dix ans afin
de vendre la glace à Marseille.
Leur première glacière, située à Mimet entre en service en 1646. Les lettres patentes de Louis XIII ne sont enregistrés qu'en 1647. La période de concession commencera donc cette année là.



Implantation des très nombreuses glacières entre Vitrolles, Marseille et Mazaugues sur fond de plan Geoportail - (zoom)

 

A l'époque la glace a aussi un usage médical. Nogaret, propriétaire de la glacière de Sainte-Marthe, raconte:
"Avant que l'usage de la glace fût introduit dans la Provence, tous les étés, la ville de Marseille était sujette à des maladies populaires et contagieuses à cause de l'intempérie de son climat, mais d'abord qu'on eut commencé d'en user, qu'on eut reconnu combien elle était salutaire, que les médecins l'eurent ordonnée aux malades, l'expérience lui donna un si grand crédit que chacun s'empressait d'en avoir, à quel prix que ce soit..."

Les Marseillais s'habituent très vite à ce luxe nouveau. Ils disent notamment :
"La clientèle fortunée en fait un usage plus raffiné. Il suffit de piler la glace avec du sel pour obtenir un mélange réfrigérant qui permet de frapper verres et carafes. En y plongeant un pot d'étain contenant lait, crème et sucre et en tournant très lentement ce mélange, on fabrique de véritables" glaces". On prépare aussi des sorbets à base de jus de fruits, notamment à bord des galères dont les officiers constituent le gros de la clientèle".

En 1648, Madame de VENEL obtient du Roy de France, le privilège de construire, à elle seule, des glacières en Provence, et de faire vendre et débiter toute la glace qui en sortira.
Le 20 décembre 1650, c'est Antoine de VALBELLE qui obtient également du Roy, le pouvoir de faire construire des glacières dans la ville de Marseille et son terroir.
Le 3 aôut 1653, Madame de VENEL obtient
le maintien de ses privilèges au détriment d'Antoine de VALBELLE, qui meurt peu après.
Le 29 décembre 1656, c'est Antoine GINOUVES qui à son tour obtient des consults, ce même privilège.
Dès 1657, le propriétaire de la glacière de Sainte-Marthe s'associe à un aubergiste, Anthoine ARQUIÉ. Ils profitent de la carence des priviligiés pour construire des glacières et pour vendre la glace sans leur permission.
La plus grande consommation de glace se fait alors par les hostes, aubergistes, cabaretiers, vendeurs de limonade et autres liqueurs....

- Création de la ferme de la glace à Marseille
Le 10 décembre 1663, la Communauté rachète le "Privilège" en espérant retirer un revenu de cet investissement. En 1666, Elle décide de créer une véritable "ferme" pour la glace, comme cela se fait pour d'autres denrées alimentaires. L'attribution du bail se fait au cours d'enchères organisées par la communauté. Le bailleur a l'exclusivité de ce commerce pour une durée de 5 ans (au lieu de un an), afin de prendre en compte le "risque climatique" de cette activité particulière.
-- le 06/09/1666 : Ferme à Pierre BOURGAREL (par l'intermédiare de Georges TIRAN) au prix d'une rente annuelle
de 1 250 livres, pour une durée de 5 ans. Hivers doux en 1668 et 1671: il manque de la glace. Le fermier en fait venir de Grenoble par bateau pour remplir ses obligations. A la fin de sa ferme en 1771, BOURGAREL est complètement ruiné, car il n'y a eu qu'un seul hiver rigoureux sur les 5 années d'exploitation.
-- le 20/11/1671 : Ferme à Barthélemy RANCUREL au prix d'une rente annuelle de 2 300 livres pour une durée de 7 ans. Avec une douzaine d'associés, ils créent la "Compagnie de la Ferme de la Glace de la Ville de Marseille".
Les particularités de ce bail sont les suivantes :
** Vente de glace à volonté, du 1er avril à fin octobre au prix de 6 deniers la livre
** 100 livres d'amende chaque fois qu'il manquera de la glace (ou augmentation du prix)
** Exploiter (ou construire à leurs frais) 2 glacières à MIMET et 2 autres à la SAINTE BAUME d'une capacité de 6000 quintaux chacune (240 tonnes)
** Mis en place de 4 bureaux de vente dans les quartiers de Marseille

Plan ancien relatif à l'implantation
des glacières de Marseille - (zoom)

Afin d'éviter une situation inconfortable, les associés louent pour 6 ans toutes les glacières disponibles dans le secteur. En 1677, douze glacières Marseillaises sont répertoriées pleines, pour une capacité totale de 56 000 quintaux (2250 tonnes). En 1678, pas de froid, il n'y en aura que 6800 quintaux. En 1682 et 1683, la glace manque à nouveau ... et la société n'a plus un sou en caisse.
-- Le 17 août 1684, la ferme revient à Honoré RAMBAUD
(par l'intermédiare de Claude BRUN), après de "surabondantes enchères" qui durent deux mois, au prix d'une rente annuelle de 5 800 livres pour une durée de 6 ans.
RAMBAUD aura bien des démêlés pour arriver au terme de san contrat.
-- En octobre 1690, la ferme est adjudée à Grégoire de THEURE
au prix d'une rente annuelle de 9 500 livres pour une durée de 6 ans.
Celui-ci signe un acte de rémission au profit d'Honoré RAMBAUD.
-- Le 24 octobre 1696,
la ferme est adjudée à Claude TAUPIN, Dominique ACHARD, Joseph JAUBERT et Antoine CHAUD (par l'intermédiaire d'Etienne BROY) au prix d'une rente annuelle de 4 500 livres pour une durée de 6 ans.
Le 1er mai 1701, Louis XIV révoque les privilèges relatifs au commerce de la glace en France. Il revend ces privilèges à Louis de BEAUMONT pour 1 100 000 livres. Mais celui-ci ne peut pas respecter ses engagements. Il est alors proposé à la Communauté de Marseille de racheter cette propriété pour 80 000 livres ! Celle-ci lance à nouveau une adjudication.
-- Le 7 janvier 1702, la ferme est adjudée à Jean RAMBAUD au prix d'une rente annuelle de 11 000 livres pour une durée de 6 ans. En 1706 il y a un hiver trés doux, alors que celui 1709 sera "l'horrible hiver", le pire que la FRANCE ait connu.

-- Le 4 juin 1712, la ferme est adjudée à BESTOIN au prix d'une rente annuelle de 7 200 livres pour une durée de 6 ans. Suite à son recourt auprès du Conseil du Roi, Jean RAMBAUD est subrogé au bail de la ferme de la glace fait à BESTOIN, pour le même temps et aux mêmes conditions.
- En juillet 1717, la ferme est adjudée à REBOUL au prix d'une rente annuelle de 8 000 livres pour une durée de 6 ans. La peste de 1720 isole la ville de Marseille.
-- Le 21 novembre 1722, la ferme est adjudée à Jean-Joseph RAMBAUD au prix d'une rente annuelle de 4 500 livres pour une durée de 3 ans. Il meurt malheureusement de la peste en 1723. Sa veuve Catherine MICHON avec l'aide son frère termine leur ferme en 1725 avec de grosses difficultés financières.

-- Le 17 janvier 1726, la ferme est adjudée à Hyacinthe MAURIN
au prix d'une rente annuelle de 2 200 livres pour une durée de 3 ans
.

A ce moment là, la demande de glace est tomber à 150 tonnes pour l'année (c'est le quart de la quantité vendue avant la peste de 1720). Les causes évoquées de cette chute sont les suivantes :
*** La glace est rare, suite aux hivers doux et donc difficile à ramasser et à stocker.
*** La glace est chère, car il y en a peu et elle vient de loin (de la Sainte Baume) et les muletiers sont devenus rares car beaucoup ont péri pendant la peste.
*** La glace est suspecte. La moindre rumeur lui attribue l'origine de la maladie.
*** Le nombre de militaires a fortement baissé suite au transfert des troupes à Toulon. Les officiers sont habituellement de bons consommateurs de glace.

- La Régie à Marseille de 1728 à 1768
De 1728 à 1768, la ferme de la glace sera mise aux enchères et ne trouvera pas preneur. Les échevins de la Communauté nommeront un directeur afin qu'il gère au mieux la ferme en régie durant cette période. Cela s'avérera aussi difficle que pour les fermiers avec la difficile équation à trouver dans les périodes d'hiver doux entre quantité de glace disponible, frais de fonctionnement et prix de la glace qui dissuade les acheteurs potentiels.

- Les dernières fermes
-- En 1769, la ferme est adjudée à Michel OLLIVE au prix d'une rente annuelle de 600 livres pour une durée de 7 ans. Dans les environs de Marseille, il n'y a plus que la glacière du Pin qui est utilisable.
-- Le 6 décembre 1776, la ferme est adjudée à Louis GUERIN au prix d'une rente annuelle de 1 400 livres pour une durée de 3 ans.
La période de 1777 à 1783 fut caractérisée par une grande remontée des températures annuelles.
L'hiver 1789 fût un hiver "terriblement froid". C'est jusqu'à cette année là que GUERIN continua l'exploitation de la ferme de la glace jusqu'à la délibération du 24 mars 1789 qui mit un point final au régime des fermes, mais ce commerce perdure dans la liberté la plus totale tout au long du XIX ème siècle.


Graphique des variations de températures sur 20000 ans
mettant en évidence la période du réchauffement médiéval
puis le petit âge glaciaire - (zoom)

 


Graphique de la consommation de glace à Marseille - (zoom)

 


Variation du prix de la glace de la ferme - (zoom)

- Création de la ferme de la glace à Toulon
-- Vers 1718, le sieur HERMITTE passe un contrat avec la Communauté de Toulon pour la fourniture de glace dans cette ville. Ce contrat est ensuite renouvelé en 1722.
Celui-ci s'approvisionne directement aux glacières de la Sainte Baume.
-- Vers 1759, Toulon consomme 1000 quintaux par mois (consommation annuelle de Marseille à la même date).
La famille GUERIN est fermière de la glace de la Ville de Toulon depuis 1760.

- Création de la ferme de la glace à Hyères
Lors de la séance du conseil municipal du 23 mars 1739 (réf. BB3 p.115) :
"L'an 1739 et le 23ème jour du mois de mars avant midi, par devant le notaire royal et greffier de la Communauté de cette ville d'Hyères en présence des témoins soussignés, furent présents monsieur Joseph BATAILLE, avocat en la cour, sieurs JOURRE, RAYNAUD, De Hiacinte, ROUX maire et consuls de la communauté d'une part et le sieur Pierre LHERMITE de la ville de Toulon et d'autre. De leur gré ont convenu et accordé que le dit Sieur LHERMITE fournira au public du dit Hyères pendant le temps et terme de six années consécutives, la courante comprise, toute la glace qui lui sera nécessaire à raison de 8 deniers la livre, dont la débite en sera faite en cette ville au frais et dépends du sieur LHERMITE, depuis le 1er mai jusqu'au 15 du mois d'octobre de chaque année ; à peine de tous dépends, dommages intérêts pendant lequel temps le dit sieur LHERMITE promet et s'oblige qu'il ne manquera point de glace et qu'elle sera débitée et délivrée journellement à tous ceux qui se présenteront pour en avoir, avec cette condition expresse qu'au cacs qu'il arrivât qu'il manquât de la glace durant un jour entier tant seulement et que ce défaut procédât de la part du dit sieur LHERMITE ou de son débitant, en ce cas il sera permis aux dits sieurs Maire Consuls d'en envoyer chercher à frais et à dépends et le dit sieur LHERMITE condamné à une amende de trois livres pour chaque contravention, à quoi il s'est volontairement soumis et obligé ; et les dits sieurs Maire Consuls de leur part, ensuite de leur pouvoir de délibération du conseil général du 15 du mois de février dernier, promettent et s'obligent en faveur du dit sieur LHERMITE qu'il ne sera débité dans cette ville et son terroir autre glace que celle qui sera par lui fournie à peine de dommage et intérêts et de confiscation et pour l'observation du présent, les dits sieurs Maire Consults, obligent les biens et revenus de la dite communauté et le sieur LHERMITE les siens et sa personne à toute cours de soumission..
Concédé acte, fait en public au dit Hyères dans l'hotel de ville, présents Joseph BAUSSAN, practicien et Jacques REYNAUD, perruquier de la même ville, témoins requis...."


Glacière au pied des remparts nord du château d'Entrecasteau - (zoom)

 


Glacière de Cotignac à proximité de la source Saint Martin - (zoom)

Après 1789
La production de glace s'industrialise avec la construction de vastes bassins de gel qui sont associés à de grandes glacières. Le réseau routier qui s'améliore permet l'utilisation massive de charrettes (au lieu des chargements directs sur les mulets et ânes). Le prix de revient qui diminue permet l'utilisation de la glace pour la conservation du poisson et de la viande.
Avec l'essor économique de 1830, la demande augmente rapidement, pour atteindre 5 000 tonnes par année en 1885 (125 000 quintaux).
A partir de 1890, le transport ferroviaire qui se développe, va permettre la commercialisation de la glace alpine sur les différents marchés côtiers à des prix très compétitifs. Les glacières arrêteront leur activité à partir de 1907. Ce marché ferroviaire durera jusque vers 1930. Le progrès technologique va porter le coup de grâce à la production de glace naturelle avec celle produite en usine à la fin du XIXème siècle.

Néanmoins, la glace récoltée en montagne sera présente sur les étals jusque dans les années 1920-1930, car très longtemps la glace dite "naturelle" a eu ses clients inconditionnels.


Production de glace dans les Alpes - (zoom)
La glace industrielle

En 1685, le physicien français Philippe de la Hire fut le premier à produire artificiellement de la glace en enveloppant une toile pleine d'eau fraiche avec du sel d'ammoniac humide.
En 1851, l'américain John Gorrie mit au point la première machine à fabriquer de la glace.
En 1860, Ferdinand Carré, ingénieur, construisit le premier appareil réfrigérant par vaporisation d'ammoniaque, suite aux découvertes des physiciens anglais Leslie en 1811 et Faraday en 1823, relative à la liquéfaction des gaz.
Avec la découverte de la machine à fabriquer de la glace, on va arrêter progressivement la récolte de glace que l'on faisait sur les nombreux sites de production.
On doit aussi à Monsieur Carré, le compartiment frigorifique du "Paraguay", grâce auquel on fit le premier transport de viande congelée entre l'Europe et l'Amérique.
En 1876, l'ingénieur Charles Tellier équipa un bateau avec des cales réfrigérées. Ce bateau était spécialisé dans le transport de viande de boeuf sud américaine.

Les premières fabriques de glace industrielle sont opérationnelles à partir de 1890.

FABRIQUE DE GLACE A HYERES
Ci-après un extrait du journal "Le Provençal" du 19 décembre 1955 qui nous détaille la conception et le fonctionnement d'une fabrique de glace installée à Hyères par la famille MARTELLI à partir de 1897. La première de la région.

"Le matériel comprend (en 1955) : six compresseurs développant au total une puissance de 200 cv pouvant produire deux cent trente mille frigories/heure. Trois bacs à congélation de quatre, sept et quinze tonnes, dans lesquels sont placés les mouleaux (récipiants métalliques), dans lesquels l'eau pure se transforme en pain de glace.
Sur la toiture, une station de refroidissement servant à liquéfier les gaz ayant servi dans les compresseurs et qui se sont chauffés, comprenant quatre pompes centrifuges 60 mètres cubes à l'heure.
Les mouleaux sont placés dans le bac par rangées de douze ; sont remplis d'eau de la ville qui est reconnue biologiquement pure.
Le bac contient lui même une eau saumâtre, additionnée de chlorure de calcium, qui empêche sa propre congélation aux températures en dessous de zéro.
Cette eau est refroidie par un mélange gazeux réfrigérant qui circule à l'intérieur d'un serpentin sous l'impulsion des compresseurs. Le froid est produit par la détente directe du gaz d'ammoniac qui dégage un grand nombre de frigories.
Ces frigories sont communiquées au bain qui circule entre les mouleaux contenant l'eau pure dont la température décroît petit à petit. Au bout de dix-huit heures la glace s'est formée.
Les mouleaux sont alors sortis du bain à l'aide d'un élévateur et trempés dans un bain tiède qui décolle les pains de glace des parois intérieures du récipient.
Il n'y a plus qu'à les incliner pour voir sortir les longs "bâtons" que tout lemonde connaît bien.
Les gaz qui ont servi à produire le froid se sont réchauffés. Ils sont amenés dans des tuyaux jusqu'à la station de refroidissement qui se trouve sur la toiture où se liquéfient à nouveau et retournent dans les compresseurs où ils sont prêts à effectuer un autre cycle."

La fabrication industrielle des réfrigérateurs électriques à usage domestique va apparaître aux USA dans les années 1920, et en Europe à partir de 1935 . Cela va entrainer le déclin progressif des fabriques de glace industrielle à partir de 1960.
Celle d'Hyères arrêtera définitivement son activité en 1967.

Le réfrigérateur .... et le congélateur sont aujourd'hui les appareils indispensables dans toutes nos cuisines.

Pourtant, comment s'organisaient nos parents et grands parents jusque vers les années 1950 sans réfrigérateur ?
D'une façon schématique :
--- pour les produits qui s'altéraient rapidement : ils achetaient, ils cuisinaient et ils consommaient (viandes diverses, animaux de la basse-cour, poissons, lait ... avec lequel ils faisaient le yaourt),
--- ils mangeaient beaucoup plus de légumineuses qu'aujourd'hui, comme les haricots secs, lentilles, pois chiches etc... qui apportaient les protéines nécessaires ainsi que les céréales.
--- dans le lieu le plus frais de la maison il y avait le "garde à manger " équipé de sa moustiquière qui permettait de conserver : les oeufs, le fromage, les charcuteries sèches ; saucisson, jambon cru etc ...)
--- les légumes et les fruits achetés au coup par coup ne posaient pas de soucis,
--- le pain qui avait une part importante dans l'alimentation se conservait plusieurs jours car il était fabriqué avec de la farine complète et du levain naturel,
--- en été, le beurre était descendu dans le puits de la maison à l'intérieur d'un panier et il était suspendu au ras de l'eau.

Aujourd'hui, notre mode de vie et nos habitudes ont bien changé !

 


Publicité pour appareil à produire de la glace - (zoom)
(site original - http://urzhiata.emoc.org)

FABRIQUE DE GLACE A HYERES
ETABLISSEMENTS MARTELLI


Vue intérieure de l'usine - (zoom)


Personnel en activité dans l'usine - (zoom)


Sortie des mouleaux à l'aide d'un élévateur - (zoom)


Les" pains sortis" du moule sont disposés sur
une planche par avant d'être emportés - (zoom)

La glace naturelle en Provence
sur le massif de la Sainte Baume et Marseille

Glacière de type "puits" recouverte d'un bâtiment
avec isolation thermique - (zoom)


Plan de situation des glacières de Font Frège - (zoom)


Glacière traditionnelle monobloc avec voute - (zoom)

Localisation
- Le Var
Durant un peu plus de deux siècles, environ une quarantaine de glacières et puits à glace ont été aménagées sur différentes
communes du Var. Celles qui ont été répertoriées sont notamment situées à Aiguines, Ampus, Brovès, Brue-Auriac, Barjols, Cabasse, Callian, Carnoules, Claviers, Comps-sur-Artuby, Correns, Cotignac, Draguignan, Entrecasteaux, Evenos, Fréjus, La Cadière, La Garde-Freinet, La Roquebrune, Le Castellet, Cuers, Le Beausset, Le Luc, Le Val, Lorgues, Montauroux, Montfort, Pignans, Rians, St-Maximin, Trans.
Dans le massif de la Sainte-Baume, le site de Font Frège (signifiant en provençal "source froide") est situé dans l'ubac du Mourré d'Agnis à environ 800 mètres d'altitude sur la commune de Mazaugues. Il possède la plus ancienne glacière qui date de 1640. A ce jour, les vestiges de 18 (sur 21) d'entre elles, restent encore visibles dans ce seul secteur à l'abri du soleil et du vent.

- Les Bouches du Rhône
Dans la ville et autour de Marseille, il y en avait au moins une trentaine qui se situaient sur différents sites :
-- L'hubac de la Chaîne de l'Etoile : Mimet (1686), Château de Mimet (1670), Fabrégoule (1668), Simiane Collongue (1700), Le Pin (1686).
-- L'Est de l'étang de Berre : Vitrolles (1663), Le Griffon (1680), Le Logis du Repos (1680), Marignane (1673), Saint Victoret, Lançon.
-- Le ruisseau des Aygalades, le Cavavelle : La Bédoule (1671), Sainte Marthe (1656), Les Baumes de Saint Antoine (1665), Les Gallades-Frême Morte (1665), Saint Joseph (1670), Servière (1670), Saint Jérôme 1 (1659), Saint Jérôme 2 (1661).
-- Le ruisseau de l'Evêque : Saint Lazare-Camp de l'Evêque (1665), Le Gros Horloge (1665), Rue des Isnard (1665).
-- Les bords du Jarret et vallon de l'Huveaune : Plaine Saint Michel (1660), Chemin de la Magdeleine (1680), Notre-Dame du mont (1686), Quartier de la Loube (1690), Saint Loup (1689), Pont de Joux-Auriol (1700), Les Encaneaux-Auriol (1698), Auriol Village (1702).

Les plus importantes étaient destinées à alimenter en glace les zones urbaines de Marseille et également Toulon.

Alimentation en eau
Le massif calcaire de la Sainte Baume permet de stocker une importante quantité d'eau lors des périodes pluvieuses. Cela donne ensuite naissance à de nombreuses sources. Les eaux de celles-ci sont alors canalisées vers les bassins de congélation pour les plus importantes. Pour les autres, la glace est récupérée sur tous les plans d'eau disponibles qui ont gelés (ruisseaux, cours d'eau, champs inondés, bassins etc...)

Bassins de congélation
Ceux de la glacière de Pivaut s'étendent juste à côté et au dessus de celle-ci.
L'aire de congélation est d'environ
5000m2. Elle est composée de trois bassins dont le fond est imperméabilisé par la présence d'argile et qui sont séparés par des butées de terre et de murettes. Celles-ci permettent la circulation du personnel qui transporte la glace extraite et offre la possibilité de remplir les bassins individuellement
.

Différentes types de glacières
- Glacières occasionnelles
Certains écrits témoignent de stockage de glace sous des édifices, dans des souterrains très frais, mais de taille modeste.
C'est en principe pour de la consommation familiale.
- Glacières de stockage
Elles sont généralement de taille relativement modeste (de 50 à 150 m3 pour 8 m maxi. en profondeur) et se situent à proximité des lieux de consommation. .
- Glacières de production
Elles sont le plus souvent de grandes tailles et se situent à proximité immédiate des lieux d'extraction de la glace (et des chutes de neige qui font un apport complémentaire), mais loin des lieux de consommation.

Construction des glacières
- Mode d'emploi

Un texte découvert dans les archives paroissiales de Sainte-Marthe par Gilles Milhière donne la synthèse des éléments indispensables à sa réalisation. Ci-après la reproduction littérale :
"Mémoire pour faire une glacière :
-- Premièrement faut avoir un lieu pour faire la glacière propre c'est à dire quy soit à un endoit que ne soit point dominé à cause que les eaux pluviales ne lui puissent pas entrer dedans car si cela arrice la glacière ne vaudra rien.
-- Pour une glacière de 2000 quintals (1) faut la faire de vingt sept à vingt huit pans (2) profondeur. Faut quelle aye en haut au plan de la porte vingt trois pans large franc d'oeuvre.
-- Au fond de la glacière faut qu'elle aye aussy quatorze ou quinze pans largeur aussy franc d'oeuvre.
-- Faire la porte ou du côté mistral ou de la montagnière à cause que se sont les deux vents les plus frais.
-- Par ainsi l'ouvrier qui la fera prendra ses mesures de la restraindre de quatre pans par chaque canne (3) en ôtant la terre ou en fesant la massonerie.
-- Si la faire à cape de four (4) faut que l'ouvrier fasse les batayos (5) plus épaisses que sy la faites faire avec des saumies (6) c'est la connaissance de l'ouvrier.
-- Pour le couvert sy lon met des tuilles faudrait luy mettre des tuilles nié (7) à cause que le gel et le degel les brisent tous est estant come je dis nié avec du mortie mêlé avec du platre que les tuilles ne soit point en dure beaucoup davantage.
(1) quintal = env. 40 kilos --> 2000 quintals = 80000 kg = 80 tonnes
(2) pan = 25 cm --> 28 pans = 7 mètres
(3) canne = 2 mètres
(4) cape de four = voûte
(5) butayos = contrefort, butée
(6) saumies = poutres
(7) nié = rayé

- Creusement du puits
- Il faut essayer de trouver un terrain tendre pour creuser le puits. Il faut cependant qu'il ait une tenue suffisante afin de prévenir les éboulements qui nécessiteraient alors la mise en place d'étaiements.

- Les murailles
Elles sont construites en blocs extraits dans l'environnement du site. Ceux-ci sont grossièrement équarris mais ajustés à la perfection. Ils sont liés au mortier de chaux ce qui permet de rendre la paroi étanche. Leur épaisseur constitue l'isolant principal pour la conservation de la glace. A la glaciaire de Pivaut cette épaisseur atteint de 2,50 mètres à la base.
Comme expliqué dans le mémoire ci-dessus la partie basse des parois est évasée vers l'intérieur.
Pour assurer une bonne isolation thermique du bâtiment la partie centrale du mur est rempli de terre argileuse dans la partie hors-sol.
- La couverture en tuiles
-- Sur voute
Le plus souvent les glacières ont une couverture en voûte de pierres dite en "cape de four" et peuvent également être réalisées en pierres sèches. Une couche de sable provenant des déblais renforce l'isolation de la voûte et sert d'assise pour la pose de la couverture en tuiles.

-- Sur charpente bois
La glacière du Pin près de Septèmes a sa couverture de tuiles supportée par une charpente en bois, comme pour un entrepôt mais avec une isolation complémentaire qui peut être réalisée avec de la paille.
- Le fond de la glacière et sa vidange
Le sol est de forme concave afin de concentrer les eaux de fusion de la glace en un point particulier. Il est réalisé en dalles disjointes qui dirigent ces eaux vers un canal d'évacuation. Celui-ci part du fond de la glacière et sort à l'air libre au bas de la pente où celle-ci a été construite. Les caractéristiques de ce canal sont très variables selon les sites. Il est indispensable d'évacuer ces eaux car sinon cela accélèrerait la fusion de la glace. La quantité d'eau fondue représente environ 10% du volume stocké dans la glaciaire pour une saison. Ce canal permet également d'évacuer les eaux qui servent à nettoyer le réservoir avant son remplissage.
Dans le cas de la glacière du Pin, il a été impossible de réaliser cette évacuation des eaux en gravitaire car la roche et très dure. Il a fallu creuser un puits de 1,40m de diamètre et de 12m de profondeur juste à côté de la glacière et les relier entre eux à la base par un petit boyau. Un homme était payé tout au long de l'année pour vider les eaux de fusion de la glace de ce puits.

- La glacière GAUDIN (dit de Pivaut)
- Elle a une hauteur totale de 23 mètres et un diamètre extérieur de 19,80 mètres. Cela a représenté environ 4500 m3 de déblais à extraire. Commencé en 1875, il faudra une dizaine d'années avant qu'elle ne soit mise en service.
- La glacière, qui est sur un terrain pentu, est enterrée environ au 2/3.
- Les ouvertures sont initialement au nombre de cinq. Elles définissent alors deux niveaux de remplissage et sont équipées de triple portes entre lesquelles est mis en place de la paille afin d'accroître l'isolation.

Le personnel qui travaille aux glacières
Les paysans situés à proximité des glacières constituent la main d'oeuvre occasionnelle essentielle pour l'exploitation de celles-ci en hiver comme en été.

Production de la glace sur place
A la glacière de Pivaut, la hauteur d'eau dans les bassins qui est d'environ 15cm à 20 cm, permet de produire 750 m3 lorsque la glace a entièrement prise. Dans la pratique, sauf par très grand froid, la glace est récupérée dés qu'elle atteint 3 à 5cm d'épaisseur. La scie permet de découper les blocs de glace au gabarit souhaité afin de les transporter jusqu'à la glacière à dos d'homme, avec des bêtes ou des wagonnets. Ce travail se fait essentiellement au petit matin lorsque la température est encore basse.
Dans certaines régions qui ne peuvent pas aménager de bassins de congélation, c'est la neige qui va être récupérée et stockée. Il y aura alors un travail de compactage plus important à réaliser.

Récupération de glace extérieure
Dés l'ouverture de la glacière, en complément au bassins de congélation, les habitants des environs se mobilisent afin de récupérer de la glace sur tous les plans d'eau disponibles. En 1729, la charge de mulet (140 kg environ) se négocie à 3 sols. Les archives nous indiquent qu'en 1729, 150 personnes différentes apportent de la glace pendant 23 jours représentant 8700 charges de mulet, 5500 charges de bourrique (soit environ 2000 tonnes).

Stockage de la glace
- Nettoyage du fond de la glacière
Afin d'avoir une bonne qualité de glace, il faut que la glacière soit dans un état parfait de propreté. Tous les dépôts accumulés sont enlevés et l'ensemble est rincé à grande eau.
- Préparation du fond de la glacière

Afin d'éviter que la glace ne soit au contact de l'eau de fonte, il est indispensable d'isoler la masse de glace du fond de la glacière. Pour cela plusieurs techniques vont être utilisées :
-- La plus courante consiste à entreposer des sarments de saule constitués de branches droites entrelacées (
1000 sarments pour une glacière de 700 m3).
-- Une autre consiste
à poser des troncs d'ifs les uns contre les autres .
-- A Arles, il y a neuf piliers de pierre de taille qui supportent des madriers en bois de chêne sur lesquels sont clouées des pareplanches de 4 pouces d'épaisseur, espacées de 1 pouce pour l'écoulement de l'eau.
Sur chacune des ces trois préparations sont rajoutés des fagots de branchage (tamaris ou autre) sur lesquels il va être mis en place une épaisseur de paille qui complète
l'isolation du fond du stockage.
Pour une glacière de 700m3, cela nécessite le travail de 5 à 6 paysans durant une semaine environ.
- Remplissage de la glacière
La glace est ensuite descendue dans la glacière de différentes manières suivant la consistance de la glace (basculement direct, au moyen de cordes et poulies dans des récipiants ou sur des plans inclinés).
Les ouvriers accèdent au fond de la glacière à l'aide de grandes échelles. Là, c'est dans la pénombre froide et humide, juste éclairés par des lampes à huile, qu'ils vont réaliser ce travail pénible de "cavage" (compactage de la glace ou de la neige) par couche de 20 à 40 cm à l'aide de dames de bois. Chaque épaisseur est séparée par de la paille. Au fur et à mesure, un isolant constitué généralement de paille est placé verticalement entre les parois de la glacière et la glace.
Lorsque le remplissage est terminé il faut alors réaliser la confection du "chapeau". Pour recouvrir l'ensemble, il faut une glace d'une qualité particulière qui doit être parfaitement lissée. Avant de fermer la glacière, l'espace compris entre le chapeau et la voûte doit être rempli de paille .

Toutes les ouvertures sont
alors condamnées au moyen de triple portes afin d'assurer une bonne isolation thermique. Pour augmenter celle-ci, l'espace ainsi laissé est également bourré de paille. Dans certaines glacières la porte principale ne s'ouvre pas directement sur l'extérieur mais dans un sas semi-tempéré qui peut servir d'atelier ou de logement.
Pour une glacière de 700 m3 cela représente environ 600 journées de travail sur une période de 3 semaines environ.

Commercialisation de la glace
- Période
Dans les archives de la ville d'Hyères nous retrouvons trace d'un contrat passé en 1739 entre la communauté et sieur Lhermitte relatif à livraison de glace entre le 1er mai et le 15 octobre. Cela nous prouve que l'extraction et les livraisons de glace se faisaient pratiquement durant la moitié de l'année.

- Extraction
Les portes, calfeutrées en général vers février, sont ouvertes au début mai. La paille qui protège "le chapeau" a pourri sous l'effet de la glace qui a fondue. Il faut donc faire un bon nettoyage de celle-ci avant de commencer l'extraction. La glace est alors découpée en blocs et comprimé dans deux types de cornues :
-- La première technique semble avoir été le remplissage de cornues en bois
équipées de deux poignées en bois afin de pouvoir les soulever avec un palan, les manipuler à la main et les attacher sur le dos des mulets. Ce moyen de transport est essentiellement employé jusque vers 1790.
-- La deuxième technique consiste à comprimer la glace dans des moules métalliques cylindriques sans fond qui s'ouvrent verticalement avec des charnières. Ils sont
hissés au moyen de poulies jusqu'à la porte de la glacière. Les pains de glace, qui pèsent 300 kg, sont alors démoulés et chargés sur des charrettes.
L'isolation thermique est constituées de sacs de jutes, de paille et de végétaux divers afin de limiter la fonte de la glace.

Il est estimé que dans le massif de la Sainte Baume il était produit en moyenne de 1000 à 3000 m3 de glace par année avec environ une soixantaine d'ouvriers.
- Transport
-- Avec les animaux
Le transport est assuré de nuit par des cortèges de mulets et de bourriques (ânes) afin de livrer la glace juste à l'aube, principalement dans les villes de Marseille et de Toulon. Afin de gagner du temps des raccourcis sont quelquefois empruntés et les accidents ne sont pas rares. Les premiers arrivés sont sûr de vendre leur glace. Durant le parcours il y a une perte de 20 à 30% du volume.
Il est à préciser que la glace était pesée à la sortie du puits.
-- Par bâteaux
Quand la glace manque pour des raisons climatiques, le fermier va quelquefois en chercher jusqu'à Grenoble, par bateaux, car tous les jours ou la glace manque, c'est une amande à payer !
Il faut alors descendre l'Isère et le Rhône avec des bâteaux spécifiques pour ce genre de transport, puis ralier Marseille par la mer.
Avec tous les aléas de transport et les conditions climatiques
, la glace s'accomode mal d'un si long parcours. Les quantités débarquées sont bien souvent minime par rapport au volume chargé.
- Distribution

A Marseille, de 1642 à 1660, la glace est vendue directement essentiellment dans les auberges.
Ensuite, au temps de la ferme, la vente se fait directement dans des "bureaux" dont l'emplacement est fixé par les échevins.
Le fermier de la ville de Toulon, signe des contrats de ferme également avec d'autres commnunes comme nous l'avons vu pour la ville d'Hyères.
Au fur et à mesure que la temps passe .... la glace fond ..... et prix augmente !

Différentes utilisations de la glace
- Les pains de glace à placer dans des armoires fermées herméthiquement afin de rafraichir les denrées alimentaires et les boissons (ancêtre du réfrigérateur),
- La glace concassée permet de rafraichir directement les étalages des poissonneries et autres,
- La glace pour rafraichir les couverts et verres avant un repas,
- La glace à immerger dans les boissons (glaçons),
- La glace pour réaliser des sorbets et glace (à l'ancienne),
- La glace à immerger dans des bacs d'eau pour refroidir les bouteilles et autres boissons,
- La glace pour des applications médicales (boissons fraiches ou applications locales sur les maux à soigner).

La glace naturelle fabriquée à la Sainte-Baume a toujours été un produit de luxe relatif. Jusqu'au début du XXe siècle, le kilo de glace se vendait au prix du blé !

 


Schéma de fonctionnement de la glacière de Pivaut
avec ses bassins de congélation situés juste
au dessus de l'ouvrage - (zoom)


Illustration de sciage de la glace - (zoom)
(site original : http://www.stpierreetmiquelon.com)


Illustration du transport de la glace vers les glacières
(zoom) - (site original)


Extrémité de la galerie d'évacuation des eaux de fonte de la glace qui sert également de galerie d'accés pour l'entretien de la glacière lorsque celle-ci est vide - (zoom pour voir l'intérieur)


Porte principale de la glacière pour l'extraction de la glace - (zoom)


Porte inférieure pour la sortie de la glace avec son mur de 2,50 mètres d'épaisseur - (zoom)


Intérieur de la glacière de Pivaut et ses accés - (zoom)


Intérieur de la glacière et sa voute en coupole - (zoom)


Façade sud de la glacière de Pivaut - (zoom)


Bassins de congélation à la glacière de Pivaut. A gauche, un des murs de séparation des bassins - (zoom)


Façade ouest avec à droite son plan d'accés de chargement - (zoom)


Plan d'accés pour chargement de la glacière de Pivaut
à proximité des bassins de congélation - (zoom)


Fond de la glacière. On peut voir le départ de la galerie d'évacuation des eaux de fonte de la glace- (zoom)


Transport de neige ou de glace à dos d'homme
(zoom) - (site original)


Cornue en bois de 40cm de diamètre et 55cm de hauteur (70 litres) avec poignées taillées dans bois massif - (zoom)
Cette cornue qui servait à faire les vendanges à Hyères
ressemble peut-être à celles utilisées pour le
transport de la glace


Illustration de transport avec mulet qui portait ainsi deux cornues de 70 kg - (zoom) - (site original)


Avec l'amélioration du réseau routier le transport de la glace vers les sites de livraison peut se faire avec les charrettes - (zoom) - (site original)


Armoire glacière pour le stockage de la glace et des aliments - (zoom) - (site original)


Sorbetière en bois avec manivelle et moules à glace en cuivre - (zoom) - (site original en 2015 : http://www.historicfood.com )

Sources pour réaliser cette page


Après ma visite à la foire à la glace de Mazaugues en février 2007, j'ai souhaité faire une synthèse de ce sujet qui m'a passionné.

Le texte que vous venez de lire a été rédigé essentiellement à partir des informations contenues dans
le livre de Charles Casals et Victor Moussion "LA GLACE NATURELLE ET SON COMMERCE A MARSEILLE SOUS L'ANCIEN REGIME".

Vous pouvez vous procurer ce livre ainsi que d'autres sur l'histoire de la glace naturelle sur le site
Découverte Sainte-Baume livre - écomusée-territoire

 


Le Musée de la Glace de Mazaugues a ouvert ses portes le 5 juin 1999.
Il a été réalisé par l'association ASER Centre Var, avec le soutien du Conseil Général du Var, de la Région Sud PACA et de la commune de Mazaugues.

Pour plus de renseignements, s'adresser à l'association ASER du Centre-Var,
Maison de l'Archéologie, 23 rue de la République, 83143 LE VAL - Tél. : 04 94 86 39 24

Bibliographie pour informations complémentaires

- L'ARTISANAT DE LA GLACE EN MÉDITERRANÉE OCCIDENTALE
par 'Ada ACOVITSIOTI-HAMEAU. Supplément n°1 au Cahier de l'ASER - 20011 (ré-éd.) - 120 pages

- DE NEIGES EN GLACES... ACTES DE LA PREMIÈRE RENCONTRE INTERNATIONALE SUR LE COMMERCE ET L'ARTISANAT DE LA GLACE
textes réunis par 'Ada ACOVITSIOTI-HAMEAU. Supplément n°5 au Cahier de l'ASER - 1996 - 232 pages

- GÉNIES GIVRÉS
par 'Ada ACOVITSIOTI-HAMEAU, Maxime DUMINIL et Cédric REY. Supplément n°9 au Cahier de l'ASER- 2003 - 106 pages

 

 

mis à jour le 06/01/2015